À quel membre de l'UE a-t-on demandé ce qui a été demandé à la Serbie ?

18. juil 2021.
Dans une interview à l'agence autrichienne APA, le ministre des Affaires étrangères Nikola Selaković a souligné que le dialogue entre Belgrade et Priština est le sujet le plus important sur la voie de la Serbie vers l'UE, exprimant sa confiance que Belgrade n'aura pas à renoncer au Kosovo pour adhérer à l’Union et que rien de tel n’a été demandé à aucun des pays candidats.

«Connaissez-vous le cas d'un pays candidat qui a dû faire quelque chose de similaire pour devenir membre ?», a demandé Selaković.

Le ministre a également demandé comment cela pourrait être une condition préalable à l'adhésion à l'UE, dans une situation où tous les membres n'ont pas la même position concernant le Kosovo.

«Le Kosovo n'est pas seulement une province du sud selon la Constitution de la Serbie, mais aussi en vertu de la résolution 1244 de l'ONU. La Serbie a rejoint l'ONU avec ses frontières, qui incluent le Kosovo et Metohija, et nous sommes membre de l'ONU», a-t-il souligné.

Dans le même temps, il indique que Belgrade est toujours prête pour une solution de compromis avec Priština, qui doit être durable, applicable et acceptable pour les deux parties.

«Cela ne veut pas dire qu'un côté obtient tout et l'autre rien», a-t-il relevé.

Selon l'APA, Selaković ne voulait pas parler de ce à quoi pourrait ressembler un compromis, et quant au recoupage de frontières, il a déclaré que personne n'en parlait.

« Il n'y a aucune solution de ce genre sur la table» a-t-il souligné.

Lorsqu'on lui a demandé si Belgrade pouvait accepter le fait que les Albanais du Kosovo ne veulent pas vivre en Serbie, il a répondu par la question: «Est-il raisonnable qu'un million de Serbes de Bosnie-Herzégovine soient forcés de vivre en Bosnie-Herzégovine ?».

Précisément parce qu'il s'agit de principes, à ses dires, la Serbie soutient pleinement l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine.

«Nous savons que notre position envers la Bosnie-Herzégovine préserve notre position vis-à-vis du Kosovo. Je n'ai rencontré personne qui puisse m'expliquer pourquoi le principe d'autodétermination ne devrait s'appliquer qu'aux Albanais du Kosovo, mais pas aux Serbes de la République Srpska", a-t-il indiqué.

Selaković a ajouté que sur la question du Kosovo, la communauté internationale pensait que le recoupage de frontière était une bonne solution.

«Je ne pense pas que ce soit une bonne solution. Si la frontière change une fois, cela arrivera toujours. Ce n'est pas bon pour la région, pour nous non-plus », a déclaré le chef de la diplomatie serbe.

Selaković a critiqué le Premier ministre kosovar Albin Kurti, indiquant que Priština ne veut pas mettre en œuvre l'Accord de Bruxelles, c'est-à-dire l'obligation de former l’Association des municipalités serbes.

«S'il y a un accord, alors il doit être respecté, que cela plaise ou non à quelqu'un», a-t-il dit.

Belgrade, dit-il, a rempli toutes ses obligations et attend maintenant que l'UE et les Albanais du Kosovo le fassent.

Selaković s'est dit préoccupé par les sympathies de Kurti concernant l'unification du Kosovo et de l'Albanie, ajoutant qu'il n'était pas préoccupé par ses déclarations, mais par «le silence dans les capitales européennes».

Selaković conseille au futur haut représentant de la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine Christian Schmidt d'être impartial.

«Si une solution est souhaitée pour la Bosnie-Herzégovine, il ne faut pas s’ingérer et se ranger d’un côté», a-t-il déclaré.

Les Serbes de Bosnie, dit-il, ont de bonnes raisons d'être sceptiques vis-à-vis du haut représentant de la communauté internationale.

Il a déclaré que l'ancien Haut Représentant a utilisé ses pouvoirs pour limiter les compétences de la RS.

«L'Accord de paix de Dayton est l'un des projets de paix les plus réussis non seulement en Europe, mais dans le monde, et il doit être préservé», a souligné Selaković, ajoutant que des modifications de l'accord ne sont possibles qu'avec le consentement des trois peuples et deux entités de Bosnie-Herzégovine.

Sur la question de la voie européenne de la Serbie vers l'UE, il a critiqué le processus d'adhésion à l'Union et l'hypocrisie de certains pays dans leur traitement de la Serbie.

«Comment se peut-il que les États membres de l'UE soient prêts à accepter des citoyens de l'UE, mais pas la Serbie en tant que membre?», a-t-il demandé.

Selaković a indiqué que les objectifs du processus d'adhésion à l'UE sont en constante évolution.

Même si la Serbie, en tant que premier candidat de la région, a accepté la nouvelle méthodologie, elle n'a pas reçu de date d'adhésion, ce qui, dit-il, est une énorme différence par rapport aux précédents cycles d'élargissement de l'UE dans lesquels les conditions et les dates étaient claires dès le début.

La Serbie est bien préparée à l'adhésion à l'UE, a-t-il souligné se référant aux données économiques.

Selaković a indiqué que cette année la croissance économique de la Serbie sera supérieure à 6 %, que le pays répond aux critères de Maastricht sur la dette publique et que le taux de chômage est passé de 26,9 % à 9 % au cours de quelques dernières années.

Selon lui, de nombreux jeunes Serbes retournent maintenant dans la patrie pour travailler dans les entreprises internationales.

Il a également souligné que la Serbie attire la plupart des investissements étrangers directs de la région.

Selaković met en relief que l'adhésion de la Serbie à l'UE ne devrait pas être importante uniquement pour notre pays.

«Nous voyons que l'UE pourrait regretter beaucoup plus si la Serbie ne devenait pas membre de l'UE», a-t-il souligné, ajoutant qu'après tout, l'UE ne veut pas de «vide» dans la région.

Selaković estime également qu'il est important pour l'UE d'obtenir du «sang frais».

Concernant la question de la lutte contre la migration illégale, il a dit qu'il était paradoxal que la Serbie soit confrontée à des vagues de migrants en provenance du territoire de l'UE. Il a relevé que de nombreux pays sont intéressés par un partenariat avec la Serbie sur cette question.

«D'une manière ou d'une autre, il est devenu normal de vouloir avoir la Serbie comme partenaire lorsqu'il s'agit des questions problématiques, mais on ne veut pas de Serbie en tant comme partenaire ou membre concernant les bonnes questions», a-t-il indiqué.

Parlant du Premier ministre hongrois Viktor Orban, Selaković a remercié pour son soutien.

«Peu importe si nous partageons tous sa position, c'est un grand leader et un homme courageux, et le seul problème que je vois avec lui, c'est qu'il est quelqu'un qui dit toujours ce qu'il pense. Malheureusement, ce n'est plus courant dans le monde d'aujourd'hui», a cité Selaković.

Il a rappelé que l'Europe est fondée sur la liberté d'expression et qu'elle survivra tant qu'elle acceptera les différences concernant les divergences d’attitudes.

Il dit personnellement vouloir que l'Europe soutienne plus fortement son identité et sa culture, au lieu de parler constamment uniquement du marché, du commerce et de l’argent.

 Source: Tanjug